Capital IdeasTM

Perspectives d’investissement de Capital Group

Categories
Volatilité boursière
La guerre Russie-Ukraine pourrait dégrader nettement la conjoncture économique mondiale

L’offensive russe en Ukraine, aujourd’hui la plus grande guerre terrestre en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale, affecte des millions d’individus – qui se retrouvent contraints de se rendre dans des abris ou de fuir leur domicile – et pourrait provoquer une crise humanitaire à grande échelle. L’escalade très préoccupante du conflit a des conséquences dramatiques pour les populations prises au piège de cette crise.


Cet article traite des possibles retombées économiques et boursières du conflit.


L’impact géopolitique de l’invasion russe en Ukraine pourrait se résumer à quelques facteurs fondamentaux, parmi lesquels la durée du conflit et la réaction des pays occidentaux.


Il est encore trop tôt pour évaluer les retombées économiques du conflit, tant à court terme (alors que les États-Unis et l’Europe tentent de minimiser les dommages causés par la flambée des prix des hydrocarbures) qu’à long terme (alors que les gouvernements revoient le cadre stratégique qui a prévalu depuis la fin de la guerre froide). La manière dont la situation évolue sera déterminante.


« Tout dépendra de la durée et de l’intensité du conflit », indique Jared Franz, économiste chez Capital Group, dans une note de recherche adressée aux analystes et gérants de portefeuille.


Jared Franz et d’autres économistes de Capital Group basés aux États-Unis, en Europe et en Asie, suivent de près la situation liée à l’Ukraine. Ils sont notamment à l’affût des répercussions économiques de la flambée des prix de l’énergie, mais aussi de la capacité des banques centrales à trouver le juste équilibre entre maîtrise de l’inflation et stimulation de la croissance – un exercice d’autant plus périlleux dans le contexte actuel.


De l’avis des économistes de Capital Group, un conflit prolongé pourrait exacerber une inflation déjà élevée, tout en augmentant le risque d’un ralentissement de la croissance. L’économie américaine peut cependant s’appuyer sur un marché de l’emploi solide, une consommation dynamique et des résultats d’entreprises attendus en hausse en 2022. À supposer que le conflit ne s’intensifie pas, Jared Franz pense que le PIB américain pourrait croître de 2 % à 2,5 % cette année. C’est moins que l’estimation de 2,5 % à 3 % publiée en début d’année, mais cela reste en ligne avec le niveau de la croissance observé avant la crise sanitaire.


Compte tenu du contexte, voici quelques réflexions en matière d’économie et d’investissement.


Les marchés internationaux ont tendance à faire abstraction des conflits géopolitiques, à moins que ceux-ci n’engendrent un choc des prix de l’énergie.


À l’exception des services de renseignement, peu d’observateurs s’attendaient à une invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie. Cet élément a son importance à l’heure d’évaluer le conflit et d’envisager son déroulement possible. Mais pour Talha Khan, économiste politique chez Capital Group, la situation actuelle suit une logique d’escalade des tensions, sans porte de sortie visible. La guerre pourrait donc durer, voire s’enliser, provoquant un lourd coût humanitaire et économique qui se répercutera sur l’économie mondiale.


Cela dit, l’histoire pouvant s’avérer très utile pour estimer les conséquences possibles, Talha Khan a examiné l’impact de centaines de conflits armés sur le S&P 500, sur la période de 1964 à 2014, et constaté que même ceux qui durent ont rarement un effet à long terme : en moyenne, l’indice progresse en réalité de 10 % pendant les hostilités.


Même si cela peut paraître déroutant, « les périodes de très forte volatilité ont toujours eu tendance à se transformer en opportunités pour les investisseurs de long terme prêts à utiliser à leur profit les chocs de marchés majeurs, indique Khan. Seule exception à cette règle : lorsque le conflit armé mène à des chocs sur les prix énergétiques. »


Et ce pourrait bien être le cas actuellement. La Russie exporte plus de 6 % du pétrole mondial et quelque 40 % du gaz naturel consommé en Europe. Les prix se sont envolés, le baril de Brent ayant franchi le seuil de 100 dollars pour la première fois depuis 2014. Alors que les premières sanctions occidentales semblent vouloir épargner les achats de gaz et de pétrole russes, d’autres décisions punitives pourraient suivre, sans compter de possibles mesures de riposte de la Russie.


L’analyse de Talha Khan montre donc que la chute initiale des cours boursiers a été plus prononcée lors des conflits susceptibles de perturber les approvisionnements énergétiques mondiaux ou de faire monter les prix du pétrole. Cependant, même dans ce cas de figure, à l’issue des combats, le S&P était déjà remonté.


L’économie mondiale pourrait subir le contrecoup de la guerre en Ukraine par l’entremise d’un approvisionnement énergétique perturbé.


Tout dépendra dans quelle mesure et pendant combien de temps les prix de l’énergie flamberont. D’après les estimations de Jared Franz, chaque hausse de 10 % du cours du pétrole pourrait rogner la croissance du PIB américain de 0,2 point. En d’autres termes, si le brut bondit – durablement – de 50 %, la croissance pourrait être amputée de 1 %.


Talha Khan a également dressé un parallèle intéressant avec la guerre israélo-arabe de 1973, à l’issue de laquelle certains membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) ont mis les États-Unis sous embargo pétrolier, provoquant une envolée des prix des hydrocarbures et des pénuries de gaz. Mais lorsque les exportations ont repris en 1974, les prix n’ont jamais retrouvé leurs niveaux préalables et se sont stabilisés 30 % plus haut. Cette évolution structurelle a encore plus alimenté la stagflation (situation d’une croissance économique faible ou nulle associée à une inflation forte) qui a marqué les années 1970.


Cette comparaison n’est cependant pas parfaite, en ce sens que les États-Unis sont aujourd’hui beaucoup moins dépendants de sources d’approvisionnement extérieures, et qu’il n’y a pas eu de pandémie dans les années 1970. Les deux périodes permettent toutefois de mettre en balance les mesures de politique économique mises en œuvre pour faire face à la situation. Dans les années 1970, l’offre énergétique limitée a fait monter les prix et comprimé le pouvoir d'achat des ménages. Aujourd’hui, le défi est de maîtriser l’inflation tout en favorisant une reprise économique encore fragile.


Pour Talha Khan, « La leçon tirée des années 1970 est qu’il faut surveiller attentivement les anticipations d’inflation. Si les banques centrales se montrent trop attentistes, on pourrait assister à une spirale de hausse auto-alimentée des salaires et des prix. Mais si, à l’inverse, les responsables politiques relèvent les taux d’intérêt trop tôt, ils courent le risque de saper les premiers signes de reprise. »


La zone euro est la première concernée par la hausse des coûts énergétiques.


L’Europe étudie déjà des moyens de réduire sa dépendance au gaz naturel russe, explique Michael Thawley, économiste politique chez Capital Group. L’Allemagne, par exemple, a suspendu sa procédure de certification du gazoduc Nord Stream 2 destiné à acheminer davantage de gaz naturel russe. Parmi les alternatives envisagées figurent le développement des énergies renouvelables, le recours accru au gaz naturel liquide et les importations de gaz d’autres pays. Mais de tels changements prendront du temps et nécessiteront de lourds investissements.


Comme l’ajoute Michael Thawley, « L’Europe devra restructurer son secteur énergétique et réduire considérablement sa dépendance aux hydrocarbures russes. Elle devra pour cela revoir ses approvisionnements en gaz et comment ils répondent à ses besoins énergétiques. Pour y parvenir, il faudra agir plus rapidement et faire d’importants investissements. »


Les banques centrales pourraient repousser leur calendrier de hausse des taux d’intérêt


Dans le cadre de leurs efforts de maîtrise de l’inflation et de normalisation de l’environnement monétaire, la Réserve fédérale américaine (Fed) et la Banque centrale européenne (BCE) entendent mettre progressivement fin à leurs politiques monétaires accommodantes. Alors que la Fed semblait vouloir relever ses taux directeurs plusieurs fois cette année, et que la BCE prévoyait de ralentir son programme d’achat d’obligations, l’instabilité actuelle pourrait cependant les inciter à reconsidérer certaines de leurs intentions, remarque Robert Lind, économiste chez Capital Group.


« La solide demande d’hydrocarbures ne fera qu’exacerber les tensions qui pèsent sur l’offre, ce qui contribuera à alimenter l’inflation tout en affaiblissant la croissance. C’est le pire scénario possible pour les responsables politiques, car le cocktail associant inflation supérieure et croissance économique inférieure est très difficile à gérer pour les banques centrales. »


Comme Robert Lind le précise, la solution ne se résume pas simplement à relever ou non les taux.


« Si la politique monétaire demeure trop accommodante pendant trop longtemps, alors la situation se complique. Je pense que les banquiers centraux se montreront très prudents et qu’ils feront très attention à ne pas répéter les erreurs passées. D’après moi, ils poursuivront le processus de resserrement, mais avec encore plus de précautions qu’à l’ordinaire. »


Les sanctions sont sévères et il pourrait y en avoir d’autres.


Depuis le début du conflit, les États-Unis et l’Europe ont mis en place plusieurs sanctions à l’encontre de la Russie. Entre autres, le gouvernement de Vladimir Poutine, mais aussi certaines banques et entreprises russes, ne peuvent plus accéder aux marchés financiers occidentaux. Les États-Unis ont restreint leurs exportations vers la Russie de matériel technologique essentiel utilisé à des fins militaires et civiles. Les pays occidentaux ont également pris des mesures inédites, ciblant par exemple le patrimoine personnel de Vladimir Poutine, mais aussi celui de chefs d’entreprise et d’élus proches du chef du Kremlin.


De plus, et c’est peut-être la sanction la plus lourde, les États-Unis et l’Europe ont exclus temporairement certaines banques russes du système de messagerie interbancaire Swift, ce qui revient à empêcher ces dernières de réaliser des transactions à l’international. Précisons que cette décision épargne notamment les banques traitant les opérations liées au secteur de l’énergie. Une exclusion généralisée du secteur couperait pour ainsi dire la Russie du reste du monde.


Le conflit et les sanctions qu’il suscite pourraient affecter d’autres matières premières.


Les effets des sanctions prises contre la Russie pourraient ne pas se limiter au secteur du pétrole et du gaz. La Russie est un important fournisseur de minéraux, tels que le palladium (utilisé en électronique), le titane (utilisé dans l’aviation), le nickel (composant essentiel de certaines batteries du secteur des énergies renouvelables), le cuivre (très répandu dans une grande variété d’applications industrielles) et la potasse (utilisée dans les engrais).


« Le problème, c’est qu’en représailles des sanctions occidentales, la Russie pourrait limiter, voire suspendre ses exportations de certaines de ces matières premières devenues indispensables, explique Michael Thawley. Et même si elle ne le fait pas, les importateurs chercheront à développer de nouvelles chaînes d’approvisionnement pour être moins tributaires de la Russie. » Dans tous les cas, cela se traduira par une hausse des prix des matières premières, car les entreprises se mettront en quête de nouvelles sources sur des marchés plus étroits, et cette hausse se répercutera alors sur les prix des produits finis.


Si rien ne permet d’affirmer aujourd’hui que le conflit en cours s’étendra hors d’Ukraine, il est clair qu’un tel scénario contribuerait à attiser ces problèmes. De nombreux pays ont d’ores et déjà manifesté leur soutien moral à l’Ukraine, et la Russie menace de sanctionner ceux qui apportent une aide matérielle ou qui acheminent des équipements militaires vers l’Ukraine.


« Nous devons faire attention à ne pas provoquer un élargissement du conflit, avertit Michael Thawley. Ce risque n’est pas négligeable. »


Les investisseurs doivent garder leur vision de long terme et résister à l’envie d’anticiper les mouvements des marchés.


Tout motif d’incertitude, en particulier s’il s’agit d’un conflit militaire, peut avoir des effets déconcertants. Pourtant, l’histoire a démontré que la meilleure ligne de conduite, en matière d’investissement, est de s’en tenir à son plan à long terme. L’effondrement des marchés actions internationaux depuis janvier a contribué à affaiblir les valorisations, tout en créant des opportunités d’investissement potentielles parmi les entreprises qui n’ont pas échappé aux pressions baissières. Malgré toute la difficulté à encaisser les corrections boursières, il faut se rappeler que les marchés peuvent se redresser à tout moment. Et si les résultats passés ne constituent aucune garantie des résultats futurs, les marchés ont, dans les faits et en général, progressé davantage qu’ils n’ont reculé.


 



Les résultats passés ne préjugent pas des résultats futurs. La valeur des investissements et le revenu qu’ils génèrent ne sont pas constants dans le temps, et les investisseurs ne sont pas assurés de récupérer l’intégralité de leur mise initiale. Les informations fournies dans le présent document ne constituent pas une offre de conseil en investissement, en fiscalité ou autre, ni une sollicitation à l’achat ou à la vente de titres.

Les déclarations attribuées à un individu représentent les opinions de ce dernier à la date de leur publication, et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de Capital Group ou de ses filiales. Sauf mention contraire, toutes les informations s’entendent à la date indiquée. Certaines données ayant été obtenues de tiers, leur fiabilité n’est pas garantie.

Capital Group gère des actions par le biais de trois entités d’investissement, qui décident en toute indépendance de leurs investissements et de leurs votes par procuration. Les professionnels de l’investissement obligataire assurent la recherche et la gestion d’actifs obligataires par le biais de Capital Group. Pour ce qui concerne les titres apparentés à des titres de participation, ils agissent uniquement pour le compte de l’une des trois entités d’investissement en actions.