Investir en cette période de pandémie a soulevé une toute nouvelle série de défis. Mais à certains égards, les fondamentaux n’ont pas changé. Les bénéfices des entreprises sont toujours importants.
À vrai dire, ils pourraient même être plus importants que jamais, comme l’affirme Rob Lovelace, vice-président du conseil et président de Capital Group. M. Lovelace, qui est également l'un des gestionnaires de portefeuille du Fonds Capital Group ciblé actions canadiennesMC (Canada), explique que même si le marché haussier trahit son âge et aurait déjà dû subir une correction, ce n'est pas pour rien que la pandémie n'a pas réussi à le renverser.
J’aime me fier à un cadre à trois volets pour faire de telles observations : pandémie, économie et marchés. La pandémie continuera de circuler pendant un certain temps, mais elle aura de moins en moins d’impact sur l’économie. C’est le modèle que nous avons déjà observé. La santé de l’économie est plus importante pour les marchés obligataires que pour les marchés des actions, lesquels dépendent des résultats des entreprises cotées en bourse, et de nombreuses entreprises ont tiré leur épingle du jeu même malgré la COVID-19. Il est donc peu probable que la pandémie freine l'économie, qui devrait continuer de croître tout comme les entreprises, qui semblent bien positionnées pour prospérer.
Après l’effondrement des marchés provoqué par la COVID-19 au premier trimestre de 2020, les actions n’ont pas seulement rebondi : elles ont repris une ascension qui, nous pouvons maintenant le constater, se poursuit depuis une dizaine d’années. À la tête de ce mouvement, on trouve le même groupe de valeurs technologiques américaines que nous appelions à l’époque les géants de la technologie : Facebook (aujourd’hui Meta), Amazon, Apple, Netflix et Google (aujourd’hui Alphabet), ainsi que Microsoft. Je pense que Tesla a aussi rejoint ce groupe. Cette tendance à long terme se maintient. Si la COVID-19 a interrompu la progression des marchés, elle n’en a pas changé la direction fondamentale.
La progression enregistrée en cette période de pandémie n’est que la suite d’un long marché haussier aux États-Unis.
Sur cette période de 10 ans, nous avons clairement vu l’accumulation d’excès, qu’une correction permet généralement de résorber. Cela ne signifie pas qu’elle se produira rapidement, mais une stabilisation, sinon une correction complète, des prix serait probablement bienvenue à cette étape du cycle. Cette correction nécessaire pourrait s’amorcer dès cette année.
Je m’attends à une croissance économique solide aux États-Unis et en Europe, et peut-être moins forte en Chine. Mais comme je l’ai mentionné précédemment, les économies ne sont pas nécessairement les meilleurs indicateurs du niveau des marchés boursiers. L’évolution des marchés des actions dépendra en effet de la performance des entreprises qui les composent. Le principal moteur est la croissance des bénéfices des entreprises.
Examinons le marché boursier américain, qui a connu une croissance annuelle de plus de 16 % en USD au cours des dix dernières années. C’est un chiffre remarquable. Plusieurs croient que cette progression des marchés est avant tout due aux mesures de relance, et donc en grande partie à l’expansion des multiples. Mais ce n’est que la moitié de l’histoire. Le taux de croissance moyen composé des résultats des entreprises américaines dépasse 7 % par an. Cet essor est donc imputable tant aux résultats des entreprises qu’aux valorisations supérieures estimées par les investisseurs.
Le graphique ci-après illustre bien l’évolution du marché américain des dix dernières années par rapport aux autres grands marchés boursiers.
De solides bénéfices et la croissance du ratio C/B poussent les marchés américains à la hausse
Les autres marchés ont progressé deux fois moins vite qu’aux États-Unis. L’Europe n’a pratiquement pas connu de croissance des bénéfices, tandis qu’au Japon, les évaluations sont restées stables et les résultats ont assez bien progressé. Ces deux marchés ont donc affiché un taux de croissance composé d’environ 8 % par an. Celui des marchés émergents est encore plus faible, sachant que la Chine en représente une part importante et doit être considérée séparément.
Jusqu’à récemment, les marchés chinois étaient aussi dynamiques que les marchés américains. Maintenant que le gouvernement chinois a commencé sa campagne de prospérité commune et intervient dans différents secteurs d’activité, les évaluations ont chuté de moitié. En outre, la croissance des bénéfices en Chine a été relativement modeste. Si quelques entreprises se développent à vive allure, beaucoup d’autres dans le secteur de l’immobilier et le secteur bancaire ont perdu de l’argent, ce qui a nui à la croissance des bénéfices nets.
Ainsi, lorsque nous examinons la croissance dans le monde, la majeure partie se retrouve au niveau des résultats aux États-Unis, ce qui explique pourquoi ce marché a surpassé les autres au cours de la dernière décennie. Même si nous constatons certains excès, ce qui se passe aux États-Unis est unique et nous incite à nous concentrer sur les occasions qui se présentent sur ce marché. Mais il ne faut pas hésiter à regarder plus loin. Au Japon, la stagnation de l’expansion des valorisations d’entreprises justifie une analyse plus approfondie. D’ailleurs, si les marchés européens et chinois ont été portés uniquement par l’expansion des valorisations, nous trouvons, sous les grands indices de référence, de nombreuses entreprises intéressantes à des évaluations raisonnables. Voilà pourquoi il est avantageux de cibler les entreprises plutôt que les marchés, et de s’intéresser aux occasions, peu importe où se trouve le siège social d’une entreprise.
J’ai gagné beaucoup de connaissances au fil des années grâce aux investisseurs doués de Capital Group. La première, c’est qu’il n’est pas nécessaire de déterminer l’origine d’un incendie de forêt, il suffit de savoir que nous sommes en période de sécheresse. En observant la manière dont les marchés sont structurés aujourd’hui, les sommets qu’ils ont atteints et à quels niveaux se situent les multiples, on constate que la marge d’erreur est très petite.
Il est également important de noter que certains des excès actuels ne concernent pas nécessairement les actions cotées, mais les marchés du placement privé et les opérations dites de « placement privé dans les sociétés ouvertes ». Au vu des situations préoccupantes que j’observe dans ces segments, il n’y a pas, par comparaison, de quoi tirer la sonnette d’alarme pour les marchés boursiers. Comme nous venons de le voir, les actions américaines sont tout aussi soutenues par l’augmentation des résultats que par l’expansion du ratio C/B, ce qui est bien plus sain que ne le pensent la plupart des personnes.
Les deux principales décisions d’investissement que nous devons aborder avec un grand discernement concernent les États-Unis et la Chine. Les États-Unis sont la première puissance boursière et économique mondiale. La Chine est maintenant la deuxième puissance économique mondiale. L’enjeu fondamental actuel qui semble avoir échappé à certains investisseurs est que la Chine est un pays socialiste. Au cours de la dernière année, son gouvernement a durci le contrôle sur un certain nombre de secteurs, ce qui a entraîné une chute de la valeur de nombreuses entreprises concernées.
Malgré la déception que cela peut engendrer chez certains, cela ne signifie pas qu’il ne faut pas investir en Chine, dont l’économie affiche une forte croissance et beaucoup d’innovation, en particulier dans les secteurs de la technologie et de la santé. La Chine compte d’incroyables entreprises technologiques qu’on ne peut trouver ailleurs. De nouveaux médicaments qui y sont mis au point auront un impact majeur sur le traitement des maladies dans le monde entier. Du point de vue de l’innovation et de l’investissement, je n’écarterais donc pas la Chine. Il suffit d’évaluer la situation entreprise par entreprise et d’ajuster ses prévisions de prix en conséquence.
Nous avons déjà évoqué les cas des géants de la technologie et de leur contribution au marché haussier. Ces entreprises bénéficient d’un très large avantage concurrentiel. Elles gagnent beaucoup d’argent, et pas seulement dans leurs activités principales. Certaines d’entre elles s’appuient sur deux ou trois grands piliers de croissance. En outre, contrairement à ce qu’on peut penser, leurs valorisations sont moins tendues qu’elles ne l’étaient il y a quelques années, car leurs résultats sous-jacents sont extrêmement robustes.
Je me réjouis également des progrès réalisés dans le secteur des soins de santé. La plupart des vaccins contre la COVID-19 sont issus du système d’administration de la technologie ARNm développée il y a une vingtaine d’années, et ce système trouve enfin sa place dans les médicaments courants. Cette structure sera utilisée pour mettre au point une variété de nouveaux traitements et même des remèdes pour des maladies mortelles. Elle va changer nos vies, c’est pourquoi je m’intéresse à plusieurs entreprises dans ce segment.
Les vaccins contre la COVID-19 ont été développés à une vitesse effrénée
Il ne faut pas non plus écarter l’Europe et certains pays émergents. S’inspirant de l’expérience des États-Unis et de la Chine, ils ont créé leurs propres centres d’excellence, notamment dans le secteur technologique. Je constate également cette dynamique au Canada. De nombreuses entreprises construisent leurs propres plateformes innovantes. Elles commercialisent d’excellents produits dans les sphères du numérique et du métavers.
En tant qu’investisseur à long terme, je conserve mes positions pendant huit ans en moyenne. Je tente donc de concevoir un portefeuille « quatre saisons ». Nous avons un marché haussier incroyable aux États-Unis, à côté duquel je ne veux pas passer. Voici donc comment je procède : j’achète l’imperméable, mais j’attends avant de l’enfiler. Je veux juste l’avoir à portée de main. Il faut dire qu’avec les faibles taux d’intérêt, les liquidités perdent de leur intérêt au niveau de catégorie d’actifs défensive d’un portefeuille.
Je recherche des entreprises pérennes, solides sur le plan opérationnel, et qui versent souvent des dividendes. En raison de la durée du marché haussier et des évaluations actuelles, je suis prudent et je privilégie, dans la mesure du possible, des entreprises générant des flux de trésorerie importants. Mais lorsque nos analystes découvrent de nouvelles entreprises prometteuses et innovantes, je suis souvent convaincu d’en détenir quelques-unes dans mon portefeuille. Voilà ce que j’appelle un portefeuille « quatre saisons ». Il est composé d’une base solide, tout en permettant de saisir les occasions qui se présentent, en particulier dans le secteur numérique.
L’ESG est partout, et ne fera que gagner du terrain. Chez Capital Group, nous nous sommes engagés à intégrer pleinement les principes ESG dans notre processus de placement. Désormais, chaque titre est soumis à un filtre ESG. Nous en tenons compte dans nos décisions de placement parce que nous savons que ces facteurs motiveront les prix et les résultats.
En tant qu’investisseurs axés sur la recherche fondamentale ascendante, notre rôle est de maintenir un contact régulier avec les entreprises. Elles veulent faire ce qu’il faut, améliorer leur gouvernance, mieux traiter leur personnel et minimiser leur impact climatique. Pour y parvenir, elles font appel à nos conseils. Conscients de cette responsabilité, nous avons créé une équipe spécialisée pour placer ces facteurs ESG au centre du dialogue que nous entretenons avec ces entreprises.
Les concepts ESG sont mondiaux et s’appliquent à toutes les catégories d’actifs.
En outre, il est important d’accorder aux gestionnaires d’actifs la flexibilité nécessaire pour évaluer les entreprises sous le prisme ESG, plutôt que de les bannir simplement de leur portefeuille. Il ne faut pas voir l’investissement ESG comme un processus d’exclusion, mais comme un moyen d’identifier les entreprises qui font le nécessaire, et d’offrir un soutien à celles qui sont engagées dans cette transition.
J’observe un niveau d’appréhension au sujet de la manière dont les concepts ESG seront mis en œuvre dans notre secteur, mais aussi de l’impact potentiel des nouvelles réglementations gouvernementales, des règles supplémentaires ou des exigences de divulgation élargies. Bien qu’une certaine crainte est naturelle, j’aurais tendance à dire qu’il faut tourner la page. C’est un sujet trop important. Nous avons beaucoup à apprendre, mais, personnellement, je m’y lance avec optimisme et enthousiasme.
Tout d’abord, il faut se rappeler que même si la pandémie ne s’estompe pas, elle ne doit pas nous effrayer, car son impact sera de moins en moins fort. Ensuite, nous sommes dans la onzième année d’un marché haussier, et nous nous approchons de la fin du cycle. Une correction est probable, mais il n’y a pas lieu de paniquer. La situation sous-jacente est solide, saine et soutenue par une forte croissance des bénéfices.
Malgré toutes les inquiétudes liées à la hausse de l’inflation et à la rupture des chaînes d’approvisionnement, nous voyons beaucoup d’occasions dans les entreprises et les titres individuels à travers le monde. Je suis plutôt satisfait du paysage de l’investissement. Je suis également fier de la manière dont le monde a fait face à cette pandémie extraordinaire. Nous nous sommes retrouvés dans une situation très précaire, mais grâce à notre créativité, nous sommes parvenus à y faire face.
En résumé : restez investis. N’essayez pas d’anticiper les mouvements du marché. Nous sommes là pour vous aider.
L’indice MSCI China capte la représentation des grandes et moyennes capitalisations à travers les actions chinoises A, H, B, les « red chips » et les « P chips », ainsi que les cotations étrangères (p. ex. les CAAE). L’indice couvre environ 85 % de l’univers des actions chinoises.
L’indice MSCI Emerging Markets est un indice pondéré selon la capitalisation boursière flottante, conçu pour mesurer les résultats des marchés des actions sur les marchés émergents mondiaux. Il est composé de plus de 20 indices de pays développés et émergents.
L’indice MSCI Europe est un indice pondéré selon la capitalisation boursière flottante, conçu mesurer les résultats de plus de 10 marchés boursiers développés en Europe.
L’indice MSCI Japan est un indice pondéré selon la capitalisation boursière flottante, conçu pour mesurer les résultats boursiers du Japon.
L’indice MSCI USA est un indice pondéré selon la capitalisation boursière flottante, conçu pour mesurer la partie américaine du marché mondial.
L’indice composé Standard Poor’s 500 est un indice pondéré en fonction de la capitalisation boursière, fondé sur les résultats d’environ 500 actions ordinaires détenues par un grand nombre d’actionnaires.
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