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Les manchettes et les événements de ces dernières années ont fait en sorte que beaucoup d’entre nous se concentrent plus que jamais sur leur famille. C’est donc le moment idéal pour renforcer la planification du patrimoine familial pour les investisseurs soucieux de préserver le bien-être financier de leur famille.
En tant que professionnel de la finance, vous êtes bien placé pour jouer un rôle important pour vos clients en matière de planification du patrimoine familial. Vous avez la capacité de voir au-delà des actifs et d’adapter vos conseils en matière de gestion du patrimoine familial en fonction des besoins des différents membres et de la famille dans son ensemble. Plus important encore, vous avez les compétences nécessaires pour aider à combler le fossé de communication entre les générations très distinctes d’aujourd’hui.
Les études ne cessent d’indiquer que plus de la moitié des transferts de patrimoine échouent*, non pas en raison de la qualité des conseils en matière de planification successorale ou des structures en place, mais en raison d’une préparation insuffisante de la famille et de problèmes de confiance et de communication. Des données récentes tirées de l’étude de février 2020 sur le transfert de patrimoine générationnel des investisseurs, réalisée par Capital Group aux États-Unis, montrent qu’il existe toujours une déconnexion entre les générations en termes de leçons données et apprises.
La capacité d’amener les jeunes générations dans le giron financier augmente la valeur du service que vous fournissez à vos clients, ce qui peut approfondir vos relations et améliorer vos conseils. Cela peut également conduire à des affaires supplémentaires. Selon notre étude, 38 % de la génération X, 62 % de la génération Y et 55 % de la génération Z ont déclaré qu’ils travailleraient avec les conseillers financiers de leurs parents, et il n’y a peut-être pas de meilleure recommandation qu’une relation existante. Comme on s’attend à ce que les générations vieillissantes transmettent des actifs d’une valeur de 73 000 G$ américains au cours des 25 prochaines années**, il existe un réel besoin de planification du patrimoine générationnel.
Alors comment aider les clients à combler le fossé entre les générations? Voici quatre idées pour créer des liens afin de favoriser la constitution et le transfert du patrimoine générationnel.
1. Organiser une réunion d’information sur le patrimoine familial
Si l’objectif est la transparence, rassembler tout le monde pour des réunions de famille régulières ou des « exposés sur le patrimoine » peut être un excellent moyen de partager avec l’ensemble du groupe. Si les personnes très fortunées privilégient les séjours de retraite qui permettent au groupe d’apprendre tout en passant du temps avec leurs proches, un exposé peut aussi être un événement au bureau ou virtuel qui se déroule en un après-midi. Ce qui importe le plus, c’est que les personnes disposent du temps et de l’espace nécessaires pour se sentir plus impliquées dans la gestion globale de leur patrimoine, c’est-à-dire les objectifs à atteindre, le plan à long terme et la manière dont le patrimoine est géré. En clarifiant ces objectifs dès maintenant, on peut éviter les malentendus futurs lors des transitions de patrimoine.
Une réunion de famille est également l’occasion pour vous de sensibiliser plusieurs générations à l’éducation financière et à la santé financière, de partager une philosophie d’investissement et de faire écho aux valeurs fondamentales de la famille. N’oubliez pas, cependant, que même si vous êtes un allié de la famille, vous ne devez généralement pas avoir d’opinion sur les questions familiales. Votre rôle de conseiller doit être celui d’un tiers neutre, dont la fonction est de faciliter les choses afin qu’aucun membre de la famille ne soit seul responsable. Le fait de brouiller ce rôle peut entraîner des complications, en particulier si l’on présume que vous prenez parti ou que vous avez un objectif quelconque dans les décisions familiales.
2. Élaborer des garde-fous en matière de gouvernance familiale
À mesure que la valeur nette d’une famille augmente, il peut s’avérer nécessaire d’élaborer certaines règles de base pour le patrimoine, son contrôle et sa gestion. C’est ce que l’on appelle la gouvernance familiale. Ce concept est utilisé depuis longtemps dans la planification des entreprises familiales, où il est essentiel de mettre en place des procédures et des processus. Toutefois, les familles peuvent bénéficier d’un modèle de gouvernance même si elles ne sont pas en affaires ensemble. En effet, un modèle de gouvernance offre un moyen d’organiser la communication entre les membres de la famille, d’encourager la résolution de problèmes au sein d’un groupe plus large et le soutien mutuel dans la prise de décision.
Bien que la façon dont une famille envisage la gouvernance puisse varier, ces cinq considérations générales sont pratiquement les mêmes pour les familles fortunées :
- Contrôle : qui est le responsable? Clarifiez le rôle de chacun, afin que l’on sache qui prend les décisions financières et de planification et qui a l’autorité.
- Processus : comment les décisions sont-elles prises et communiquées? Décrivez exactement ce à quoi vous devez vous attendre pour qu’il y ait peu de surprises.
- Éducation : les jeunes générations sont-elles éduquées en matière de patrimoine, et chacun dispose-t-il de conseils appropriés sur les finances familiales et la planification financière?
- Planification : comment sommes-nous préparés aux futures questions fiscales et successorales?
- Transition : avons-nous tout mis en place pour passer le flambeau à la prochaine génération et au-delà?
Vous êtes bien placé pour aider à répondre à ces questions pour vos clients, et pour aider à coordonner et à rassembler le travail des planificateurs de fiducie et de succession, des comptables et des avocats. Mettez en place des « garde-fous » pour que la famille puisse trouver et suivre ces informations au fil du temps.
3. Définir les responsabilités en matière de dotation
Pour les familles qui ont les moyens de laisser une dotation, la charité peut être un moyen efficace d’associer les membres de la famille au processus de gestion du patrimoine. Elle peut procurer un sentiment de responsabilité, fondé sur la gestion des actifs et le soutien de la mission familiale par la philanthropie. Les fonds de dotation peuvent également encourager les familles à prendre des décisions financières au jour le jour en établissant un budget et en octroyant des subventions, tout en apprenant à se concentrer sur les avantages de l’investissement stratégique à long terme.
Bon nombre des familles les plus riches du Canada (y compris les familles des milliardaires David Thomson, Galen Weston et Jean Coutu) soutiennent des fonds de dotation bien gérés par des membres de la famille. Les actions caritatives ont souvent un attrait émotionnel qui peut attirer différents types de personnes, souvent avec de nouvelles perspectives et des points de vue différents. Certains peuvent choisir de passer à d’autres domaines de l’entreprise; d’autres peuvent vouloir rester dans le monde non lucratif et continuer à soutenir la famille de cette manière.
4. Envisager des dons à vie plus modestes
Les dons entre vifs, c’est-à-dire les dons faits de son vivant, sont un autre moyen de communiquer et de faciliter la transition du patrimoine entre les générations. Grâce aux fiducies entre vifs, un membre de la famille peut donner de l’argent ou d’autres biens de son vivant. Les fiducies entre vifs peuvent donner à la matriarche ou au patriarche de la famille un aperçu de la façon dont certains membres de la famille pourraient gérer un héritage.
Un don entre vifs soustrait les biens au processus de succession et d’homologation, et peut donner au constituant un aperçu de ce à quoi le processus de transfert de richesse pourrait ressembler. En distribuant de petites sommes d’argent aux enfants et aux petits-enfants au fil du temps, le donateur peut se sentir plus en contrôle du don et plus conscient de l’impact qu’il peut avoir sur les autres membres de la famille.
Plus important encore, cela permet aux jeunes générations d’avoir accès à vous. Soyez une ressource. Faites-leur savoir que vous êtes disponible pour répondre à leurs questions ou discuter d’idées d’investissement. Les familles qui sont associées au processus de gestion du patrimoine et qui font preuve d’une solide communication connaîtront une transition plus facile.
* Source : The Williams Group, Prepare Your Heirs: Why it’s so important for families to work together as a team, 2019.
** Source : Bloomberg Wealth, Tax-Free Inheritances Fuel America’s $73 Trillion Gilded Age, févr. 2022.
LA GÉNÉRATION DE TÊTE :
Cinq types de leadership familial
Bien qu‘il n‘y ait pas deux familles identiques, elles ont tendance à correspondre à certains archétypes. Reconnaissez-vous vos clients? Voici comment les aider à commencer à planifier.
Le type : le chef de famille (matriarche ou patriarche) pense pouvoir vivre pour toujours. La famille manque de planification le prouvant, et il n’est pas facile d’en parler.
Votre objectif : entamer la conversation et mettre en place une planification adéquate dès que possible.
La tactique : la narration est utile. Parfois, l’exercice le plus efficace consiste à s’imaginer ce qui se passerait si la matriarche ou le patriarche de la famille décédait sans qu’aucun plan n’ait été mis en place. La perspective des conséquences fiscales, du désarroi financier, des procédures judiciaires, des luttes intestines et d’une entreprise sans dirigeant peut être très convaincante. Encouragez la planification de petites donations entre vifs pour que les chefs de famille acceptent de céder le contrôle d’une partie du patrimoine, de faire entendre d’autres voix et de reconnaître l’avantage financier que représente pour eux et leurs bénéficiaires une planification fiscale immédiate.
Le type : la chef de famille sait qu’elle peut mourir et ne veut pas céder le contrôle à ce moment-là. Ces familles disposent généralement d’une pléthore de documents (fiducies, lignes directrices, instructions d’investissement, procédures, processus, limites et incitations spécifiques pour les distributions, etc.) pour tenter de gérer chaque scénario possible et de tenir compte de chaque membre potentiel de la famille. Le problème, c’est que c’est impossible.
Votre objectif : créer un plan complet, mais flexible, conçu pour évoluer avec le temps, la technologie et une famille qui s’agrandit et évolue.
La tactique : partager le risque de « contrôle de la main morte », c’est-à-dire de tenter d’exercer un contrôle trop important d’outre-tombe. Au lieu de cela, nommer quelques personnes de confiance (avec des processus en place pour désigner des successeurs) et donner à ces personnes le pouvoir discrétionnaire de gérer des situations dans le cadre d’un certain nombre de lignes directrices peut s’avérer beaucoup plus efficace que d’essayer d’anticiper les circonstances, les comportements et les actions futures. En outre, un ensemble de lignes directrices ou une déclaration de souhaits peut s’avérer très utile pour ce type de famille. Ces documents ne sont pas contraignants, mais ils énoncent des valeurs et des objectifs primordiaux que les fiduciaires doivent respecter, par opposition à des règles strictes.
Le type : submergée par les complexités financières, émotionnelles et interpersonnelles de l’entreprise familiale, la famille n’est pas en mesure d’avoir les conversations nécessaires pour assurer une transition efficace de l’entreprise d’une génération à l’autre.
Votre objectif : aider la famille à élaborer un plan de transition pour l’entreprise ou une stratégie de sortie si l’objectif est de quitter l’entreprise à la fin de la présente génération.
La tactique : avant de discuter du plan de transition, la famille doit accepter et comprendre la structure sous-jacente et l’implication de la famille dans l’entreprise. Elle peut être complexe. Notez les personnes qui contrôlent, qui bénéficient des avantages économiques et qui prennent les décisions. Ces personnes ne sont pas nécessairement les mêmes parties dans toutes les catégories. Un membre de la famille peut percevoir un salaire pour se tenir à l’écart, tandis que d’autres s’occupent des activités quotidiennes. La famille peut envisager de retirer de la circulation ceux qui ne veulent pas s’impliquer. Elle peut également utiliser les options de donation entre vifs pour transférer progressivement le contrôle afin d’aider les enfants et les petits-enfants à s’habituer à leur nouveau rôle tout en continuant à être supervisés.
Le type : la famille recomposée comprend des seconds ou troisièmes mariages, plusieurs séries de beaux-enfants, des demi-frères et sœurs, et ainsi de suite, et il n’y a pas de fin aux itérations ou aux complexités.
Votre objectif : amenez tous les membres de la famille à faire preuve de réalisme en matière de planification et d’attentes.
La tactique : aider le décideur de la famille à prévoir des dynamiques relationnelles et des situations familiales réalistes, même si elles sont désagréables. Si un second conjoint survivant ne s’entend pas avec les enfants d’un premier mariage, par exemple, cette dynamique ne changera pas après le décès de la matriarche ou du patriarche. Ou encore, trois enfants qui ne s’entendent pas aujourd’hui ne seront pas à l’aise en tant que coadministrateurs. De même, si un enfant a un vice financier, tel que le jeu, il faut supposer que ce problème subsistera au moment de la transmission du patrimoine à la génération suivante.
La transparence et la communication sont essentielles à cet égard. Cela inclut des réunions de famille pour s’assurer que tout le monde comprend la structure, les raisons pour lesquelles certaines décisions ont été prises et certaines personnes sont responsables.
Le type : quiconque prononce : « Je veux juste que tout le monde soit traité de la même manière. Je ne veux pas que quelqu’un se batte après mon départ. » Parfois, l’égalité de traitement est appropriée; par exemple, si une famille a trois enfants qui vivent tous dans la même région du pays, ont le même nombre d’enfants, exercent la même profession, épousent le même type de conjoint, etc. Tout à fait réaliste, n’est-ce pas?
Votre objectif : aider la famille à prévoir une complexité croissante au fur et à mesure que le patrimoine et la famille s’agrandissent. Au fur et à mesure que la famille se disperse et que les branches se séparent, les valeurs et les besoins financiers divergent de plus en plus.
La tactique : rappelez aux clients la différence entre égalité et équité, car l’équité est parfois l’objectif réel. Là encore, utilisez des histoires ou des hypothèses : Que se passe-t-il si l’un de vos enfants épouse une personne très riche, tandis qu’un autre enfant devient enseignant(e) et en épouse un(e) autre? Que se passe-t-il si l’un de vos enfants est un parent isolé avec un enfant ayant des besoins particuliers? Ou si l’un des petits-enfants souhaite poursuivre des études de médecine et l’autre souhaite créer une entreprise, devenir artiste ou apprendre un métier? Dans l’une ou l’autre de ces situations, leur offrirez-vous la même chose? Le terme « équitable » est subjectif et permet une certaine flexibilité. Il n’y a pas de problème si tout le monde n’a pas le même contrôle. Il est peut-être plus juste que l’enfant consciencieux, avocat de type A, soit fiduciaire, ou que l’enfant qui s’intéresse à l’art gère la vente de cette collection, et ainsi de suite.
** Source : Cerulli Associates, U.S. High-Net-Worth and Ultra-High-Net-Worth Markets 2018: Shifting Demographics of Private Wealth.
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Comment organiser une séance d’information sur le patrimoine familial en trois étapes
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Étape 1
Préparez le terrain. Aidez votre client à décider de certains aspects logistiques importants : Où se tiendra la réunion? Qui sera présent? L’invitation doit-elle venir de vous ou du client? Qu’en est-il des dissensions familiales, des familles recomposées ou de la belle-famille? Les détails sont importants; il convient donc de réfléchir soigneusement à la planification de l’événement du point de vue de la gestion du patrimoine générationnel.
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Étape 2
Établissez un ordre du jour. Définissez à l’avance les objectifs de la réunion et les sujets que vous souhaitez aborder. Les sujets à aborder dépendent de la famille, mais vous pouvez envisager les points suivants :
- L‘éducation financière et la gestion responsable du patrimoine – Commencez par des notions de base sur l’argent et préparez-vous à aborder des sujets plus complexes en fonction du niveau d’éducation financière du groupe.
- Mission et valeurs de la famille – Lors de la première réunion, l’objectif peut être de définir une mission globale pour le groupe. Préparez des exemples ou des idées basés sur les principes qui vous sont les plus familiers. Encouragez les membres de la famille à raconter leur histoire et leur expérience des finances : Quels sont vos premiers souvenirs liés à l’argent? Quels sont vos souvenirs les plus forts en matière de décisions financières? Quelles sont vos inquiétudes ou vos craintes en ce qui a trait aux finances?
- Le point sur le patrimoine – L’aspect le plus important de la réunion sera l’échange d’informations sur les finances de la famille et ses objectifs patrimoniaux à long terme. Préparez une présentation de l’état de la famille à l’aide de graphiques et de termes faciles à comprendre.
- Rôles et responsabilités – Qu’il s‘agisse de gérer les futures réunions d’information de la famille ou de jouer un rôle de premier plan dans la gestion quotidienne du patrimoine, c’est le moment d’évaluer l’intérêt et de discuter de la manière dont les autres membres de la famille souhaitent s’impliquer.
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Étape 3
Terminez par des mesures à prendre. À la fin d’une réunion d’information familiale, vous souhaiterez peut-être que les participants repartent avec des rôles spécifiques ou des mesures à prendre que vous, en tant que conseiller, pouvez aider à faciliter. Le fait de maintenir des interactions professionnelles peut aider la famille à gérer les échéances des projets sans entraîner les types d’escarmouches intrafamiliales qui pourraient autrement survenir.
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