Les débats actuels sur ce que l’on appelle « le dividende démographique » de l’Inde sont simples à comprendre : après avoir récemment dépassé la Chine comme pays le plus peuplé au monde, l’Inde pourrait aussi avoir la plus importante population en âge de travailler d’ici les 20 à 25 prochaines années.
14 mars 2025
À l’heure actuelle, 43 % de la population indienne a moins de 25 ans et l’âge médian est d’à peine 29 ans. Selon les estimations, le nombre de personnes en âge de travailler devrait franchir le seuil de 1,1 milliard d’ici 2040 (soit 69 % de la population totale)1. Le PIB par habitant devrait doubler (à 5 000 USD) au cours de la prochaine décennie2. Cette évolution stimulera considérablement la consommation, avec des dépenses pour des biens dits « discrétionnaires » susceptibles d’augmenter plus rapidement que les dépenses pour des biens « de première nécessité ».
D’après Anirudha Dutta, spécialiste de l’Inde chez Capital Group, le pays fait cependant face à deux défis majeurs : la création d’emplois de qualité et l’attractivité très faible du secteur manufacturier auprès des jeunes en l’absence de revalorisation salariale.
Au total, 78 % des 169 millions de nouveaux emplois créés en Inde entre 2018 et 2024 se concentrent dans les secteurs de l’agriculture (52 %), de la construction (13 %) ainsi que du commerce, de l’hôtellerie et de la restauration (13 %). En outre, 75 % de ces nouveaux postes sont occupés par des indépendants et 6 % par des travailleurs occasionnels.
« Si l’Inde est incapable de proposer des emplois valorisants à ses jeunes et de répondre à leurs aspirations, elle s’expose à un risque de mécontentement social. Le cas échéant, le dividende démographique pourrait virer au cauchemar, ajoute Anirudha Dutta.
En plus d’être confronté à de multiples enjeux – démondialisation, relocalisation, changement climatique, avancées technologiques, intelligence artificielle et automatisation –, le pays doit également faire face à des problèmes domestiques, comme les disparités nord-sud ainsi que les lacunes dans le domaine de l’enseignement, de la formation et des soins de santé. Certes, aucun de ces facteurs ne suffira à lui seul à dévier l’Inde de sa trajectoire, mais leur convergence pourrait lui être très défavorable. »

Anirudha Dutta est analyste macroéconomique chez Capital Group, chargé de couvrir le marché indien. Il possède 29 ans d’expérience dans le secteur de l’investissement, et a rejoint Capital Group il y a 11 ans. Il est titulaire d’un diplôme de gestion de Xavier School of Management et d’une licence avec mention en génie métallurgique de l’Indian Institute of Technology de Kharagpur. Anirudha est basé à Bombay.