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Marchés émergents
Un atterrissage en douceur pourrait soutenir la dette des marchés émergents
Robert Burgess
Gestionnaire de portefeuille de titres à revenu fixe
Harry Phinney
Responsable de placements en titres à revenu fixe

En 2024, de nombreux facteurs semblent tourner en faveur de la dette des marchés émergents (ME) malgré la possibilité d’une faible croissance économique mondiale. Une Réserve fédérale américaine (Fed) plus conciliante devrait favoriser un rebond des marchés émergents. Cela devrait profiter à la fois à la dette en monnaie locale mieux notée et, dans une certaine mesure, à la dette libellée en dollars, qui couvre une grande variété d’économies et de marchés, allant jusqu’aux économies plus risquées et plus petites, souvent appelées « marchés frontières ».


Nous voyons les plus grandes occasions dans la dette souveraine des marchés primaires (mieux notée) en monnaie locale, ainsi que dans certains émetteurs souverains de qualité investissement (notés BBB/Baa et plus) et à rendement élevé libellés en dollars. Si les nouvelles données sur l’inflation permettent à la Fed de réduire ses taux, cela devrait permettre aux banques centrales des marchés émergents de s’orienter dans une direction qui reflète mieux leurs perspectives nationales. Les émetteurs libellés en dollars peuvent également bénéficier de coûts de financement potentiellement plus faibles. Dans la plupart des économies primaires, l’inflation devrait diminuer tout au long de l’année 2024. La baisse des taux d’intérêt devrait être positive pour la duration, en particulier pour les détenteurs de titres de créance en monnaie locale. 


Si les devises des marchés émergents se sont redressées en 2023, la vigueur du dollar américain pourrait encore poser problème, même si le dollar semble surévalué selon la plupart des paramètres fondamentaux. Cette situation pourrait changer avec la baisse des taux américains, bien que le processus d’atténuation de la vigueur du dollar américain soit susceptible d’être progressif, étant donné que le niveau des taux réels reste favorable au dollar par rapport aux autres grandes monnaies et que la croissance en dehors des États-Unis reste relativement faible. Les élections dans plusieurs marchés émergents pourraient également perturber le statu quo.


Le tableau ci-dessous présente les performances des devises et de la dette des marchés émergents avant et après le début des baisses de taux de la Fed au cours des cycles précédents. Les obligations en monnaie locale et en monnaie forte (libellées en dollars) ont connu le plus fort redressement avant les baisses de taux précédentes, tandis que les devises des marchés émergents se sont mieux portées après le début des baisses de taux.


Performances des marchés émergents lors des précédents cycles de baisse des taux de la Fed

Le graphique affiche les devises et la dette des marchés émergents se sont comportées avant et après que la Fed ait commencé à réduire ses taux au cours des cycles précédents. Les obligations en devise locale et en monnaie forte (libellées en dollars) ont connu le plus fort redressement avant les baisses de taux précédentes, tandis que les devises des marchés émergents se sont mieux portées après les baisses de taux. En moyenne, les devises des marchés émergents ont gagné 2 % par rapport au dollar au cours de l’année précédant la première baisse de taux de la Fed, 1 % au cours des six mois précédents, 1 % au cours des six mois suivant la première baisse et 7 % par rapport au dollar au cours de la première année suivant la première baisse de taux de la Fed dans un cycle. Au cours de ces mêmes périodes, la dette en monnaie forte a gagné en moyenne 11 %, 6 %, 5 % et 4 %, respectivement, et la dette en devise locale a gagné 14 %, 6 %, 6 % et 3 %, respectivement. Au cours de l’année qui a précédé, des six mois qui ont précédé, des six mois qui ont suivi et de l’année qui a suivi le cycle de réduction débutant en juillet 2019, les devises des marchés émergents ont gagné 2 %, 2 %, 3 % et 9 %, respectivement. Au cours de ces mêmes périodes, la dette en monnaie forte a gagné 11 %, 9 %, 4 % et 3 %, respectivement, et la dette en devise locale a gagné 8 %, 4 %, 2 % et perdu 1 %. Au cours de l’année qui a précédé, des six mois qui ont précédé, des six mois qui ont suivi et de l’année qui a suivi le cycle de réduction débutant en juillet 2007, les devises des pays émergents ont perdu 7 %, 4 %, 5 % et ont gagné 2 %. Au cours de ces mêmes périodes, la dette en monnaie forte a gagné 7 %, 1 %, 4 % et 0 % et la dette en devise locale a gagné 21 %, 8 %, 11 % et 7 %. Au cours de l’année qui a précédé, des six mois qui ont précédé, des six mois qui ont suivi et de l’année qui a suivi le cycle de réduction qui a débuté en janvier 2001, les devises des pays émergents ont gagné 10 %, 5 %, 7 % et 9 %, respectivement. Au cours de ces mêmes périodes, la dette en monnaie forte a gagné 14 %, 7 %, 6 % et 10 %; les données sur la dette en devise locale ne sont pas disponibles pour ce cycle.

Sources : Bloomberg, J.P. Morgan. Les résultats passés ne sont pas garants des résultats futurs. La dette en monnaie forte est représentée par l’indice J.P. Morgan Emerging Markets Bond – Global Diversified (EMBI). La dette en monnaie locale est représentée par l’indice J.P. Morgan Government Bond – Emerging Markets Global Diversified (GBI-EM GD). Les devises des marchés émergents sont représentées par les monnaies des marchés émergents pondérées par l’indice GBI-EM GD par rapport au dollar américain. Les dates exactes sont les suivantes : 3 janvier 2001; 18 septembre 2007; et 31 juillet 2019. Rendements en USD.

Les États-Unis pourraient échapper à la récession, même si la croissance mondiale reste faible


Les marchés émergents ont historiquement été fortement corrélés à la croissance économique américaine. L’économie américaine semble prête à maintenir un taux de croissance économique supérieur à 2 %, même si elle est confrontée aux effets décalés du resserrement des conditions financières. Les marchés du travail restent robustes, bien que l’augmentation de l’endettement des consommateurs ait suscité quelques inquiétudes. 


Écarts de taux de la dette des marchés émergents pendant les cycles de taux et les récessions aux États-Unis

Le graphique présente les écarts de taux de l’indice J.P. Morgan Emerging Markets Bond (EMBI) et le taux des fonds fédéraux de 2000 à 2023. Au cours des cycles précédents, les écarts de l’indice EMBI ont eu tendance à augmenter lorsque la Fed a commencé à réduire les taux et à diminuer lorsque le taux des fonds fédéraux s’est stabilisé. Depuis que le taux des fonds fédéraux a commencé à augmenter en 2022, les écarts de l’EMBI ont oscillé dans une fourchette allant d’environ 350 points de base (pdb) à 460 pdb. Le graphique présente également les périodes de récession déterminées par le National Bureau of Economic Research en 2001, 2007-2008 et 2020.

Sources : Bloomberg, J.P. Morgan. Au 30 novembre 2023. Les résultats passés ne sont pas garants des résultats futurs. Axe vertical gauche : écarts de taux de l’indice J.P. Morgan Emerging Markets Bond (EMBI) (pdb). Axe vertical droit : taux des fonds fédéraux (%). Les périodes grisées correspondent aux récessions américaines telles que déterminées par le National Bureau of Economic Research.

En dehors des États-Unis, la croissance devrait rester relativement faible. Par rapport aux États-Unis, l’Europe a été plus durement touchée par le choc énergétique, et la région reste confrontée à certains des défis en matière de politique monétaire les plus difficiles à relever pour trouver un compromis entre l’inflation et la croissance. L’activité économique de la zone euro s’est stabilisée à des niveaux faibles et il subsiste un risque important de contraction dans certaines économies. Toutefois, nous pourrions assister à une reprise au second semestre 2024, si l’augmentation des investissements dans des domaines tels que la transition énergétique et la défense s’accélère, si l’inflation diminue et si les consommateurs commencent à percevoir les avantages d’une croissance plus forte des revenus réels.


La Chine devra probablement s’adapter à un taux de croissance plus faible dans les années à venir. Ailleurs dans les marchés émergents, nous prévoyons une poursuite de l’expansion économique en Asie (hors Chine), une décélération en Amérique latine et une croissance globalement stable en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique. 


Les obligations de base des marchés émergents pourraient bénéficier de la baisse des taux d’intérêt


Si la politique monétaire s’assouplit sur les principaux marchés développés, une baisse des taux d’intérêt pourrait jouer en faveur des marchés émergents en monnaie locale. Alors que les marchés émergents ont traditionnellement souffert de l’inflation, les banques centrales des pays émergents les plus développés ont relevé les taux d’intérêt plus tôt et de manière plus agressive que les pays développés afin d’éviter que les attentes inflationnistes ne prennent de l’ampleur.


L’inflation semble désormais prête à revenir dans les zones de confort des banques centrales pour la plupart des marchés émergents d’ici la fin 2024. Par conséquent, une position de duration longue semble attrayante sur de nombreux marchés d’Amérique latine, notamment au Brésil et au Mexique. Une position de duration longue semble également intéressante en Afrique du Sud, où les taux réels sont proches de la limite supérieure des fourchettes historiques et disposent d’une plus grande marge de manœuvre pour baisser que les bons du Trésor américain.


Baisse attendue des taux d’intérêt dans les marchés émergents

Le graphique présente les attentes du marché concernant les taux directeurs en Chine, en Inde, en Pologne, au Mexique, au Brésil, en République tchèque et au Chili. Au cours de l’année prochaine, l’Inde devrait réduire ses taux directeurs de 49 points de base (pdb), la Pologne de 52 pdb, le Brésil de 158 pdb, le Mexique de 176 pdb, le Chili de 297 pdb, la République tchèque de 316 pdb et la Hongrie de 417 pdb. La Chine devrait relever ses taux directeurs de 9 pdb.

Source : Bloomberg. Au 16 février 2024. 

Les banques centrales d’Asie sont susceptibles de réduire leurs taux plus tard que le reste des marchés émergents. La dette en monnaie locale en Asie a tendance à être plus corrélée avec les marchés mondiaux, mais des occasions en matière de duration existent toujours. En Chine, les faibles rendements semblent justifiés par la faiblesse persistante de l’inflation et les problèmes de croissance.


La prudence reste de mise en Europe centrale. L’inflation semble s’être stabilisée (bien qu’il soit peu probable qu’elle revienne à l’objectif comme prévu) et la croissance a été faible. Toutefois, ces tendances se reflètent dans les rendements locaux, les cycles d’assouplissement agressifs étant intégrés dans les obligations.


En ce qui concerne la dette en monnaie forte, les écarts sont assez serrés au sein des principales économies des marchés émergents de qualité investissement. Mais par rapport aux obligations d’entreprises américaines de qualité investissement, les écarts semblent raisonnablement attrayants, ce qui offre des occasions de valeur relative. Les niveaux de rendement absolu restent également raisonnablement élevés. L’attrait de ces titres réside en partie dans les avantages qu’ils procurent aux portefeuilles en termes de diversification. La Corée du Sud et le Mexique sont des exemples de crédits mieux notés vis-à-vis desquels nous sommes convaincus.


Certaines entreprises émettrices de titres en dollars américains peuvent également présenter de la valeur. Les fondamentaux des marchés émergents semblent solides, la plupart des trésoriers des entreprises des marchés émergents ayant adopté une approche prudente en matière d’emprunt. La représentation géographique et la structure de risque des obligations d’entreprise des marchés émergents sont très différentes de celles des obligations souveraines et offrent donc un élément de diversification.


Les marchés frontières sont confrontés à des défis plus importants


Le changement de cap de la Fed devrait réduire les pressions financières externes sur les marchés frontières, mais ceux-ci continueront probablement à être confrontés aux vents contraires d’une croissance mondiale relativement faible, d’une vigueur persistante du dollar et de taux américains plus élevés qu’au cours des deux décennies précédentes (même avec une Fed plus conciliante). Les écarts sur la plupart de ces titres sont encore relativement importants, ce qui offre un coussin de valorisation significatif dans de nombreux cas. Toutefois, la sélectivité est de mise. 


Écarts de dette des marchés émergents par groupe de notation

Ce graphique fournit une représentation visuelle de l’évolution dans le temps des écarts de taux de la dette des marchés émergents, segmentés en fonction des différents groupes de notation. Les pics et les fluctuations des lignes peuvent donner un aperçu des conditions économiques et de la solvabilité de ces marchés au cours des années représentées. Le graphique linéaire présente les écarts de l’indice J.P. Morgan EMBI (Emerging Market Bond Index), mesurés en points de base (pdb), sur une période allant de 2005 à 2023. Le graphique représente trois groupes de notation différents : BBB/BB, AA/A et B/C. Le groupe de notation BBB/BB (ligne bleu foncé) reste relativement stable tout au long des années, avec des fluctuations mineures. Le groupe de notation AA/A (ligne bleu clair) présente des pics importants autour de l’année 2009 et entre les années 2021 et 2023, mais reste stable. Le groupe de notation B/C (ligne verte) présente la plus grande volatilité, avec de fortes augmentations en 2009, en 2020 et à partir de 2021. L’axe des ordonnées du graphique va de 0 à 2 000 points de base. Les trois lignes présentent un pic important autour de 2009, pendant la crise financière mondiale.

Source : Indice J.P. Morgan Emerging Markets Bond (EMBI). Au 1er décembre 2023.

Des occasions attrayantes, mais des risques à prendre en compte


Plus de la moitié de la population mondiale sera appelée aux urnes en 2024. Outre certaines parties du monde développé, cela inclut plusieurs principaux marchés émergents, tels que l’Inde, l’Afrique du Sud, l’Indonésie et le Mexique, ainsi qu’un certain nombre de pays qui se dirigent potentiellement vers une restructuration de la dette ou qui sont déjà en plein milieu de celle-ci, tels que le Sri Lanka, l’Ukraine et le Ghana. Avec autant d’économies à l’aube d’une année électorale, la volatilité pourrait potentiellement augmenter, et la diversification sera donc essentielle pour les investisseurs. De même, les risques géopolitiques restent élevés et doivent être surveillés de près.


Dans l’ensemble, les économies en développement ont fait preuve de résilience ces dernières années, et nous pensons que la dette des marchés émergents restera attrayante pour les investisseurs si les fondamentaux et les rendements initiaux continuent d’être globalement attrayants. Ces marchés ont été mis à rude épreuve en 2023 et en sont sortis renforcés. Outre un cycle agressif de relèvement des taux américains, les marchés émergents ont également dû faire face à des guerres, à des tensions bancaires aux États-Unis en mars et à une vente massive d’obligations. Le fait que les marchés émergents les plus développés aient pu surmonter cette volatilité sans impact significatif démontre les progrès réalisés par ces économies. 



Robert Burgess est gestionnaire de portefeuille de titres à revenu fixe chez Capital Group et possède 32 ans d’expérience dans le secteur (au 31 décembre 2023). Il est titulaire d’une maîtrise en économie de l’Université de Londres et d’un baccalauréat en politique et économie de l’Université d’Oxford.

Harry Phinney est responsable de placements en titres à revenu fixe et possède 18 ans d’expérience dans le secteur (au 31 décembre 2023). Il est titulaire d’une MBA en commerce international de l’Université de Northeastern, d’une maîtrise en statistiques appliquées et mathématiques financières de l’Université de Columbia et d’un baccalauréat en économie politique internationale de l’Université de Northeastern.


La valeur des titres à revenu fixe peut être affectée par l’évolution des taux d’intérêt et des notations des titres.

 

L’indice J.P. Morgan Emerging Markets Bond (EMBI) Global Diversified est un indice de référence à pondération unique de la dette des marchés émergents qui suit le rendement total des obligations libellées en dollars américains émises par des entités souveraines et quasi-souveraines des marchés émergents. L’indice n’est pas géré; ses résultats tiennent compte des dividendes ou des distributions réinvesties mais ne tiennent pas compte de l’incidence des frais de compte, des charges ou de l’impôt fédéral sur le revenu des États-Unis.

 

L’indice J.P. Morgan Government Bond – Emerging Markets Global Diversified représente l’univers des obligations d’État liquides à taux fixe, régulièrement négociées sur les marchés émergents et libellées en monnaie locale, auxquelles les investisseurs internationaux ont accès. L’indice n’est pas géré; ses résultats tiennent compte des dividendes ou des distributions réinvesties mais ne tiennent pas compte de l’incidence des frais de compte, des charges ou de l’impôt fédéral sur le revenu des États-Unis.

 

Notation : va généralement de AAA/Aaa (la plus élevée) à D (la plus basse), est attribuée par les agences de notation de crédit comme Standard & Poor’s, Moody’s ou Fitch afin d’indiquer la solvabilité d’un émetteur.

 

Écart de crédit : l’écart de crédit est la différence de rendement (le rendement attendu d’un investissement sur une période donnée) entre une obligation d’État et un autre titre de créance de même échéance, mais de qualité de crédit différente.

 

La duration mesure la sensibilité d’une obligation aux variations des taux d’intérêt. En règle générale, le prix d’une obligation augmentera de 1 % pour chaque année de duration si les taux d’intérêt baissent de 1 % ou diminuera de 1 % pour chaque année de duration si les taux d’intérêt augmentent de 1 %.

 

Marché frontière : pays dont les marchés boursiers sont moins bien établis que ceux des marchés émergents.

 

Monnaie forte : désigne la monnaie émise par un pays considéré comme politiquement et économiquement stable. Les monnaies fortes sont largement acceptées dans le monde entier comme moyen de paiement pour les biens et les services et peuvent être préférées à la monnaie locale.

 

Inflation : augmentation des prix des biens et des services qui se produit lorsque les dépenses augmentent par rapport à l’offre de biens sur le marché : en d’autres termes, lorsqu’il y a trop d’argent pour acheter trop peu de biens. Les mesures de l’inflation de base excluent les éléments volatils tels que les denrées alimentaires et l’énergie.

 

Émetteur : entité juridique qui développe, enregistre et vend des titres pour financer ses opérations. Les émetteurs peuvent être des sociétés, des fonds d’investissement ou des gouvernements.

 

Taux directeur : taux d’intérêt fixé par une banque centrale pour mettre en œuvre sa politique monétaire.

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