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Dividendes : la nouvelle stratégie des géants du secteur technologique
Chris Buchbinder
Gérant de portefeuille actions
Marc Nabi
Directeur des investissements
Anne-Marie Peterson
Gérant de portefeuille actions

La décision prise par Meta de verser son premier dividende cette année – suivie peu après par une annonce similaire d’Alphabet et de Salesforce – semble marquer un tournant dans la manière dont les acteurs de la Big Tech rémunèrent leurs actionnaires.


Il faut dire que, par le passé, la mise en place de dividendes était perçue comme un signe de dégradation des perspectives de croissance des entreprises. C’est en tout cas ainsi que les investisseurs ont réagi au premier dividende de Microsoft en 2003. Plus de 20 ans plus tard, Meta semble être parvenu à faire changer les mentalités : peu après son annonce, son action a bondi de 23 %, faisant ainsi gonfler sa capitalisation boursière de quasiment 200 milliards USD.


La différence entre les deux époques, c’est que les grandes capitalisations d’aujourd’hui sont mieux positionnées que celles d’hier, que ce soit en termes d’assise financière, de bénéfices ou de valorisations. Ajoutez à cela le début d’un « mégacycle » d’investissement au profit de l’IA, et la mise en place de dividendes devient le révélateur de la discipline financière et de la confiance de Meta, Alphabet et consorts dans la prévisibilité de leurs résultats.


Pourquoi les acteurs de la Big Tech se mettent-ils à verser des dividendes ?


La décision de distribuer des dividendes (0,40 USD par action pour Salesforce, par exemple) survient après d’importants programmes de réduction des coûts et un réalignement des ressources au sein de nombreuses grandes sociétés technologiques. Au total, ce sont près de 4,2 milliards USD qui seront ainsi distribués chaque trimestre. En parallèle, les géants technologiques continueront d’investir des milliards dans l’IA. 


Le secteur technologique distribue des dividendes toujours plus élevés 

Cet histogramme empilé illustre l’évolution, entre 1999 et 2023, de la part des dividendes versés par différents secteurs d’activité de l’indice S&P 500, en milliards de dollars US. Les secteurs représentés sont les suivants : services de communication, biens de consommation non essentiels, biens de consommation essentiels, énergie, services financiers, santé, industrie, technologies de l’information, matériaux, immobilier et services aux collectivités. L’axe vertical représente la valeur, de 0 à 650 milliards de dollars, et l’axe horizontal correspond aux années. Le montant des dividendes augmente progressivement dans la plupart des secteurs. Sur la droite, un tableau recense la part, en pourcentage, des dividendes versés par chaque secteur en 2023 : technologies de l’information (14,1 %), biens de consommation non essentiels (5,7 %), biens de consommation essentiels (13,5 %), énergie (9,3 %), industrie (9,2 %), immobilier (5,4 %), services aux collectivités (5,1 %), services de communication (4,3 %), finance (17,1 %), santé (13,4 %), matériaux (3 %). En haut à gauche du graphique, un petit tableau cite les entreprises qui ont versé le plus de dividendes en 2023, avec les dividendes correspondants en milliards de dollars. Microsoft est en tête avec 20,7 milliards de dollars, suivi d’Apple avec 15,1 milliards de dollars, Exxon Mobil avec 14,9 milliards de dollars, Kenvue avec 14,6 milliards de dollars, JPMorgan Chase avec 13,5 milliards de dollars, Johnson & Johnson avec 11,8 milliards de dollars, Chevron avec 11,3 milliards de dollars, Verizon avec 11 milliards de dollars, AbbVie avec 10,5 milliards de dollars et Pfizer avec 9,2 milliards de dollars.

Sources : FactSet, Capital Group. Données de 1999 à 2023. 

Si le montant par action des dividendes versés par des sociétés comme Meta et Alphabet semble dérisoire (respectivement 0,50 USD et 0,80 USD, pour un rendement du dividende de 0,4 % et 0,5 %), le volume total est impressionnant : 5,1 milliards USD pour Meta et 10 milliards USD pour Alphabet. Et ces sommes pourraient bien augmenter au fil du temps, comme on a pu le voir dans le cas d’autres acteurs technologiques, comme Microsoft et Apple, dont les dividendes sont en hausse régulière depuis leurs premiers versements en 2003 et 2012 respectivement. 


En parallèle, les rachats d’actions devraient demeurer au cœur de la stratégie d’allocation des fonds propres de ces entreprises. Par exemple, Apple a récemment annoncé une opération record portant sur 110 milliards USD d’actions, et Meta a autorisé le rachat de 50 milliards USD d’actions. Malgré tout, de plus en plus d’acteurs du secteur de la Big Tech reconnaissent que les dividendes sont un moyen de démontrer leur engagement à rémunérer leurs actionnaires, et préfèrent éviter de réduire leurs dividendes, par crainte d’envoyer le mauvais signal aux investisseurs et de pénaliser leur action. Sans compter que les dividendes peuvent les aider à diversifier leur base d’actionnaires jusque-là composée essentiellement d’investisseurs axés sur la croissance.


Cette nouvelle tendance semble en tout cas déjà bien engagée : la part des sociétés technologiques du S&P 500 qui versent des dividendes a augmenté proportionnellement à leur capitalisation boursière, et elles se classent désormais juste derrière le secteur financier et devant ceux de la santé et des biens de consommation essentiels, qui ont traditionnellement la réputation de verser des dividendes.


Il est intéressant de préciser que 37 des 65 sociétés technologiques composant l’indice S&P 500 versent aujourd’hui des dividendes. Même si ce chiffre représente plus de la moitié du secteur, cela signifie aussi qu’il subsiste une importante marge de progression. Et dans le club très fermé des « Magnificent Seven », cinq entreprises sur sept versent maintenant des dividendes.


Les dividendes augmentent désormais dans tous les secteurs d’activité


Grâce l’accumulation de cash-flows et aux anticipations de croissance des résultats sur le marché actions américain, les perspectives concernant les actions à dividendes s’améliorent. D’après une estimation de S&P Dow Jones Indices, les distributions des sociétés de l’indice S&P 500 devraient augmenter de 6 % en 2024, contre 5 % en 2023.


La pentification de la courbe des futures sur dividendes – qui représente la croissance attendue des dividendes dans le graphique ci-dessous – met quant à elle en évidence la rapidité avec laquelle les marchés ont relevé leurs anticipations après les récentes annonces de Meta et d’Alphabet.


Le secteur technologique contribue à l’amélioration des perspectives de dividendes des sociétés du S&P 500 

Ce graphique montre que la courbe des futures sur dividendes du S&P 500 s’est pentifiée au cours du dernier trimestre écoulé après l’annonce du versement de premiers dividendes par Meta et Alphabet. Le graphique représente le prix (théorique) à payer pour percevoir tous les dividendes versés par les sociétés du S&P 500 au cours de l’année 2024. L’indice sous-jacent suivi est l’indice S&P 500 Dividend Points. Quatre points de données sont fournis sur chaque courbe. La courbe bleue, au 30 avril 2024, est orientée à la hausse. La courbe verte, au 29 décembre 2023, monte puis redescend légèrement, les données la concernant ayant été compilées avant l’annonce du versement de dividendes par Meta et Alphabet.

Capital Group, Bloomberg. Prix des futures sur dividendes sur 12 mois glissants, à 1 an, à 2 ans et à 3 ans, au 30 avril 2024. 

En tout état de cause, avec l’augmentation des cash-flows dans de nombreux secteurs d’activité, la tendance est donc à la distribution de dividendes – que ce soit pour la première fois ou après une pause plus ou moins longue. Ainsi, les sociétés de l’aéronautique, du transport aérien ou des croisières, qui avaient suspendu leurs versements pendant la crise sanitaire et qui voient désormais leurs perspectives s’améliorer, se remettent à distribuer des dividendes. 


Ryanair, par exemple, a profité, en 2023, d’un bénéfice en forte hausse et de prévisions plus optimistes pour annoncer son tout premier dividende. Booking.com a également décidé de verser un dividende à la faveur de résultats solides et d’un cash-flow sain. Delta Air Lines a pour sa part rétabli le versement de dividendes après l’avoir suspendu pendant la pandémie. Et General Electric, qui fabrique et entretient des moteurs à réaction, a récemment augmenté son dividende.


Partout, y compris dans le secteur européen de la banque (Santander, Deutsche Bank, UniCredit, mais aussi BNP Paribas), les dividendes repartent à la hausse. 


Partout dans le monde, les dividendes devraient progresser 

Ce graphique représente les prévisions de croissance des dividendes par action de trois indices boursiers : MSCI Europe, MSCI USA et MSCI Japan. L’axe horizontal correspond aux années, avec les données réelles pour la période 2013-2023, et les estimations du consensus au 24 avril 2024 pour la période 2024-2026. L’axe vertical représente les dividendes par action en dollars. Sur la période 2021-2026, c’est le taux de croissance annuel moyen (CAGR) qui est fourni. Le CAGR est de 5,3 % pour l’indice MSCI Europe. de 7,4 % pour le MSCI USA et de 10,6 % pour le MSCI Japan. Les trois courbes évoluent à la hausse sur la période représentée.

Source : FactSet. Données réelles sur la période 2013-2023, et estimations du consensus au 24 avril 2024 sur la période 2024-2026. CAGR : taux de croissance annuel moyen.

Dans le secteur de l’énergie aussi, en augmentant progressivement leurs dividendes depuis plus de 20 ans, des leaders comme ExxonMobil et Canadian Natural Resources sont parvenus à fidéliser leurs investisseurs malgré des cours pétroliers volatils. Certains spécialistes de l’exploration et de la production pétrolière/gazière ont quant à eux opté pour le versement de dividendes variables ou spéciaux en plus de leurs dividendes de base, ce qui leur permet de moduler leurs cash-flows selon les fluctuations des prix des matières premières.   


Conclusion


Les dividendes offrent divers atouts aux entreprises qui décident d’en verser. Par exemple, ils peuvent contribuer à diversifier la base d’actionnaires – entre investisseurs axés sur la croissance et investisseurs en quête de dividendes – et ainsi réduire la volatilité des actions des sociétés concernées. Et pour les individus qui reçoivent de leur employeur (souvent des sociétés technologiques et innovantes) une partie de leur rémunération sous forme d’actions, les dividendes peuvent être assimilés à une hausse indirecte de salaire et être une source de motivation dans leur travail.


Pour faire le bilan de l’année écoulée, la progression du marché actions américain semble avoir été moins concentrée et mieux répartie entre secteurs, et les sociétés qui versent traditionnellement des dividendes ont retrouvé les faveurs des investisseurs, car elles affichent une croissance des résultats supérieure et offrent un rempart contre la volatilité et les taux d’intérêt élevés.


La conjoncture actuelle pourrait permettre aux valorisations des actions à dividendes de se redresser, comme en atteste l’amélioration progressive leur PER par rapport à celui du S&P 500 (voir graphique ci-dessous).


Les actions à dividendes, une source d’opportunités 

Ce graphique illustre l’évolution de la popularité des sociétés versant des dividendes élevés par rapport à l’ensemble du marché. L’axe horizontal correspond aux années, de 1980 à 2022. L’axe vertical correspond à l’écart de rapports cours/bénéfices (PER), sur une échelle allant de -40 % à +5 %. La courbe bleue représente l’écart de PER entre les actions de l’indice S&P 500 affichant un rendement du dividende correspondant au quintile supérieur et les actions de l’indice S&P 500 au sens large. On peut observer que la courbe fluctue de manière significative, avec d’importants creux en dessous d’une ligne horizontale en pointillés, qui correspond à un écart moyen de PER de -12,9 %. Ces creux correspondent aux périodes au cours desquelles le S&P 500 au sens large offrait plus d’opportunités que les seules actions à dividendes. Les pics les plus importants se situent autour de 1999 et de 2020.

Source : Goldman Sachs. Données au 31 mars 2024. PER : rapport cours/bénéfice. Les résultats passés ne préjugent pas des résultats futurs. PER des actions de l’indice S&P 500 affichant un rendement du dividende correspondant au quintile supérieur (sans distinction de secteur d’activité), rapporté au PER de l’indice S&P 500 au sens large.

Enfin, une baisse des taux directeurs américains pourrait également servir de tremplin aux actions à rendement de dividende élevé. Car s’il est vrai que la majeure partie des près de 6 000 milliards USD de liquidités pourraient être redéployées dans l’univers obligataire, ce type d’actions sera probablement plébiscité en cas de recul des taux d’intérêt et de résilience de l’économie. 



Chris Buchbinder est gérant de portefeuille actions chez Capital Group et possède 28 ans d’expérience en matière d’investissement. Il est titulaire d’une licence d’économie et de relations internationales de Brown University.

Marc Nabi est directeur des investissements et possède 31 ans d’expérience dans le secteur de l’investissement. Il est titulaire d’un MBA en finance de l’université de New York et d’une licence en comptabilité de l’université du Michigan.

Anne-Marie Peterson est gérante de portefeuille actions chez Capital Group. Elle possède 29 ans d’expérience dans le secteur de l’investissement et a rejoint Capital Group il y a 19 ans. Elle est titulaire d’une licence en économie d’University of California (Irvine), ainsi que de la certification Chartered Financial Analyst®. Anne-Marie est basée à San Francisco.


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