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Les goulets d’étranglement liés à l’IA, une opportunité pour les acteurs de l’ancienne économie ?
Jared Franz
Économiste
Cheryl Frank
Gérant de portefeuille actions
Brad Olalde
Spécialiste produit senior

L’enthousiasme initial pour l’IA semble s’essouffler. Les promesses de gains de productivité et de transformation de l’économie qui ont galvanisé géants technologiques et investisseurs ces deux dernières années apparaissent désormais hors d’atteinte.


En cause, les contraintes liées aux ressources : depuis quelques mois, en effet, les investisseurs se demandent combien de temps encore il faudra attendre avant que les milliards investis dans l’IA se traduisent enfin par une croissance des bénéfices. Mais les goulets d’étranglement ne sont peut-être pas là où on les attend.


« Le fait qu’il faille autant de ressources physiques, qui sont par nature limitées, pour faire tourner une technologie aussi avancée que l’IA peut laisser rêveur », déclare Jared Franz, économiste spécialiste du marché américain chez Capital Group.


Au-delà des pénuries largement médiatisées de semi-conducteurs de pointe fabriqués par NVIDIA et d’autres, nos spécialistes ont identifié quatre grandes contraintes liées aux ressources qui pourraient freiner l’essor de l’IA – et en contrepartie, présenter des opportunités pour des entreprises de l’ancienne économie.


1. L’IA déclenche une ruée vers le cuivre


Les outils d’IA générative de type ChatGPT reposent sur de grands modèles de langage, lesquels sont hébergés sur des milliers de serveurs installés dans des centres de données gigantesques. Outre l’infrastructure électrique (transformateurs, générateurs, câbles, etc.), des systèmes de refroidissement sont nécessaires pour assurer un fonctionnement correct. Or, la plupart de ces équipements sont composés de cuivre. Pour donner une idée des besoins, il en a fallu 2 177 tonnes pour un centre de données Microsoft de 500 millions USD près de Chicago.


Anatomie d’un centre de données : serveurs, alimentation électrique et systèmes de refroidissement


Cet infographie illustre les différents composants d’un centre de données – serveurs, systèmes de refroidissement, générateurs, transformateurs, panneaux solaires, lignes haute tension – et la manière dont ils sont connectés au réseau électrique. On peut lire au bas de l’infographie que la construction d’un centre de données peut nécessiter plus de 2 000 tonnes de cuivre.

Source : Capital Group.

« Si les projections des "hyperscalers" s'avèrent justes, il faudra un million de tonnes de cuivre pour satisfaire les besoins de construction de centres de données ces huit prochaines années, précise Jared Franz. Et on ne parle là que du marché américain : les chiffres pour le monde entier seront encore plus astronomiques. »


On sait déjà que l’offre de cuivre sera insuffisante pour permettre à la fois la construction de véhicules électriques, la production d’énergies propres et la modernisation du réseau électrique américain. Et la construction prévue de centres de données pour l’IA devrait amplifier cette pénurie de six millions de tonnes supplémentaires à l’horizon 2030, selon JPMorgan. « Or, rien ne permet d’affirmer si les compagnies minières peuvent extraire du cuivre suffisamment vite pour répondre à cette demande. »


Afin de limiter le risque de pénuries, les compagnies minières du monde entier s’efforcent d’acquérir et de développer leurs activités dans la filière du cuivre. Grupo México, un conglomérat spécialisé dans le cuivre à faible coût, a ainsi rouvert des mines dans le sud du Pérou en juillet dernier pour doper sa production. Et le numéro quatre mondial, Glencore, est en train de renforcer sa présence en Argentine dans le but de doubler sa production à moyen terme.


2. La demande d’électricité nucléaire gagne du terrain


Comme toute technologie de pointe, l’IA a besoin d’énergie – beaucoup d’énergie. Les centres de données pourraient ainsi consommer jusqu’à 9 % de l’électricité totale produite par les États-Unis en 2030, d’après l’Electric Power Research Institute. C’est plus de deux fois plus qu’aujourd’hui. « Les centres de données et les véhicules électriques devraient accroître la demande d’électricité à un rythme inédit depuis une vingtaine d’années », explique Cheryl Frank, gérante de portefeuille actions chez Capital Group.


Les centres de données, principal facteur de demande d’électricité


Ce graphique présente les différents secteurs contribuant aux anticipations de croissance de la demande globale d’énergie, exprimées en taux de croissance annuel moyen, pour la période 2022-2030 : l’immobilier résidentiel (0,60 %), l’immobilier d’entreprise (0,40 %), l’industrie (0,40 %), le transport (0,60 %), les centres de données (0,90 %) et d’autres secteurs (-0,50 %), totalisant une croissance totale estimée de 2,40 %.

Sources : Goldman Sachs, agence américaine d’information sur l’énergie (EIA). Estimations de Goldman Sachs au 28 avril 2024. CAGR : taux de croissance annuel moyen. Autres : impact de l’amélioration de l’efficacité énergétique et de catégories non citées.

À court terme, le secteur américain des services aux collectivités sera peut-être en mesure de répondre à la flambée de la demande. Mais selon Jared Franz, il faut s’attendre à quelques complications. D’abord, la dynamique de l’offre et de la demande varie d’un État à l’autre. « Il peut y avoir des décalages dans certains États, mais si la trajectoire de demande se confirme, la production actuelle devrait suffire. En revanche, si la trajectoire double, il faudra un peu de temps pour déployer de nouvelles capacités. »


De plus, la plupart des géants technologiques se sont engagés à la neutralité carbone d’ici 2030. « Cet objectif me paraît difficile à atteindre compte tenu de leurs lourds besoins en énergie, estime Jared Franz. Pour espérer y parvenir, un maximum de sources d’énergie devra être déployé : il faudra plus d’éolien et de solaire, du gaz naturel… Il faudra peut-être même envisager de reporter le démantèlement de certaines centrales à charbon. »


Dans certaines régions où la demande est forte et l’offre plus limitée, les entreprises ne peuvent être raccordées au réseau et sont donc placées sur liste d’attente. Afin de contourner cet écueil, Microsoft s’est récemment mis d’accord avec l’exploitant de centrales nucléaires Constellation Energy pour redémarrer la centrale de Three Mile Island, en Pennsylvanie.


3. Les besoins en équipements de construction augmentent rapidement


En dépit du risque de pénurie de matériaux, la construction de centres de données et l’augmentation des capacités de production d’énergie sont une aubaine pour de nombreux industriels. La société GE Vernova estime ainsi que son carnet de commandes de turbines à gaz pour générateurs de secours et autres équipements électriques, d’une valeur de 6 400 milliards USD, pourrait tripler d’ici la fin 2024.


Par ailleurs, sachant que les puces d’IA génèrent beaucoup de chaleur, les centres de données doivent être équipés de systèmes de refroidissement liquide sophistiqués pour limiter le risque de pannes et améliorer l’efficacité énergétique. Des fabricants comme Modine et Vertiv ont vu leur action enregistrer des progressions à trois chiffres cette année dans un contexte d’envolée de la demande de leurs produits.


Les besoins en technologies de refroidissement sont une aubaine pour les sociétés industrielles


Ce graphique en courbe compare le rendement total cumulé des actions de cinq sociétés représentatives du secteur mondial des technologies de refroidissement, selon FactSet. Les rendements totaux sont les suivants : 122,4 % pour Modine, 107,3 % pour Vertiv, 38,9 % pour Eaton, 34,1 % pour ABB, 31,9 % pour Schneider Electric et 22,1 % pour S&P 500. La fourchette de rendement pour Eaton, ABB, Schneider Electric et le S&P 500 se situe entre -0,5 % et 42 %, tandis que celle pour Modine et Vertiv se situe entre -0,5 % et 124 %.

Les résultats passés ne préjugent pas des résultats futurs.

Sources : Capital Group, FactSet. Rendements totaux cumulés entre le 1er janvier 2024 et le 30 septembre 2024.

4. L’IA entraîne un important besoin de main-d’œuvre


Malgré les titres à sensation qui mettent en avant la disparition possible d’emplois à cause de l’IA, c’est peut-être plutôt une pénurie de ressources humaines qui nous guette. « Nous commençons à entendre parler d’entreprises qui peinent à recruter des ingénieurs en intelligence artificielle capables d’élaborer des modèles ou de mettre en œuvre les systèmes d’IA en entreprise », raconte Jared Franz.


Une étude récemment menée par Salesforce révèle que pour 60 % des informaticiens du secteur public, le principal obstacle à la mise en œuvre de l’IA est la pénurie de compétences.


Faute de spécialistes pour diriger le déploiement de telles solutions, il faudra sans doute plus de temps avant qu’elles soient adoptées et qu’elles puissent générer les gains d’efficacité attendus. « Je pense que les sociétés de services professionnels comme Accenture et Oracle joueront un rôle déterminant pour aider les entreprises à concevoir leur stratégie dans l’IA. Les opportunités d’emplois sont considérables dans ce secteur », ajoute Cheryl Frank.


Conclusion


L’IA promet de donner un coup d’accélérateur à la productivité et de transformer l’économie sur le long terme, mais en raison de possibles goulets d’étranglement et d’autres facteurs, l’adoption de cette technologie pourrait prendre du temps. Les progrès technologiques pourraient toutefois contribuer à atténuer une partie de ces obstacles. Par exemple, les avancées futures en matière de conception de semi-conducteurs pourraient contribuer à réduire l’électricité consommée par les centres de données.


Et Cheryl Frank de conclure : « D’après mon analyse, l’IA pourrait se développer en deux temps. Nous sommes en plein dans la première phase, dans laquelle les sociétés technologiques déploient de gros moyens pour faire connaître les modèles d’IA auprès du grand public. Et la deuxième phase sera plutôt axée sur les entreprises. Elle se déroulera sur une échelle de temps beaucoup plus longue, mais rappelons que c’est plutôt habituel dans le domaine de l’innovation. »



Jared Franz est économiste chez Capital Group et possède 18 ans d’expérience dans le secteur de l’investissement. Il est titulaire d’un doctorat en économie d’University of Illinois à Chicago et d’une licence de mathématiques de Northwestern University.

Cheryl Frank est gérante de portefeuille actions chez Capital Group et possède 26 ans d’expérience en matière d’investissement. Elle est titulaire d’un MBA de Stanford et d’une licence de Harvard.

Brad Olalde est spécialiste produit senior chez Capital Group et possède 7 ans d’expérience en matière d’investissement. Il est titulaire d’une licence en finance et en affaires internationales de Villanova University.


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